Александр Герцен - Том 6. С того берега. Долг прежде всего

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Описание книги "Том 6. С того берега. Долг прежде всего"
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Настоящее собрание сочинений А. И. Герцена является первым научным изданием литературного и эпистолярного наследия выдающегося деятеля русского освободительного движения, революционного демократа, гениального мыслителя и писателя.
Шестой том собрания сочинений А. И. Герцена содержит произведения 1847–1851 годов. Центральное место в томе принадлежит книге «С того берега» (1847–1850). Заметка «Вместо предисловия или объяснения к сборнику» посвящена вопросу о создании вольной русской печати за границей. Статьи «La Russie» («Россия») и «Lettre d'un Russe à Mazzini» («Письмо русского к Маццини»), опубликованные автором в 1849 г. на французском, немецком и итальянском языках, представляют собою первые сочинения Герцена о России, обращенные к западноевропейскому читателю. Заключает том повесть «Долг прежде всего» (1847–1851).
M. Cortès se place exactement sur le terrain des conservateurs romains, tels que Pline, Trajan, Dioclétien, Julien etc. Il voit comme eux le voyaient, par rapport à Rome, la dissolution de l'état actuel del'Europe, – il en frémit, ce qui est très naturel, car il y a de quoi frémir, – et désire sauver, à tout prix, cette société mourante. Pour la sauver, il cherche les moyens d'arrêter l'avenir.
Dans son raisonnement il part (comme les romains) d'une donnée fausse, d'une supposition sans preuve, d'une opinion exclusive. Il pense que les formes actuelles de l'existence sociale, telles qu'elles ont été élaborées par l'action mutuelle des trois éléments de l'histoire européenne: l'élément romain, chrétien et germanique, – sont les seules possibles. Pourtant nous voyons dans l'histoire ancienne et dans l'Orient contemporain des bases sociales toutes différentes, peut-être inférieures, mais d'une énorme solidité.
M. Cortès suppose que la civilisation ne peut se développer que dans les formes politiques de l'Europe actuelle. Et pourtant la Grèce et Rome sont là pour prouver le contraire. Il est facile de dire (comme l'a fait l'orateur) que le monde ancien a été cultivé et non civilisé. C'est de la scolastique, de pareilles distinctions n'ont de succès qu'en théologie. La civilisation du monde antique a été une civilisation de minorité, comme la nôtre. Comme la nôtre, pour être possible, elle avait besoin d'antropo-phagie. Mais il ne s'ensuit pas encore qu'on ait le droit de donner la préférance au monde moderne, si préférance il y a, sous ces dénominations de culture et de civilisation. Le monde qui a commencé par l'Iliade, qui a produit Phydias, qui s'est résumé dans un Aristote, et qui, vers son déclin, terminait sa belle carrière par Horace, était bien cultivé et bien civilisé. M. Cortès n'a pas même remarqué qu'en disant lui-même que la seule source de notre civilisation est le christianisme, il en a reconnu le caractère historique, c'est-à-dire temporel. Loin de voir l'aube matinale d'une nouvelle journée, d'une civilisation beaucoup plus humaine encore que la civilisation chrétienne, M. Cortès, toujours tourné vers le passé, ne voit que la dissolution des formes absolues pour lui, et au delà la barbarie et l'invasion russe.
Frappé de cette lugubre perspective, il cherche des moyens de salut; mais où trouver un point d'appui, quelque chose de stable dans ce monde agonisant? Tout est «pourriture», tout se décompose… Poussé par le désespoir, il s'adresse à la mort morale et à la mort physique; il veut s'appuyer sur le soldat et sur le prêtre.
Quelle est donc cette organisation sociale qui demande de pareils moyens de salut?
Et quelle qu'elle soit, vaut-elle la peine d'être conservée à ce prix?
Nous sommes d'accord avec M. Cortès, l'Europe telle qu'elle est à présent, s'en va. Le socialisme, dès sa première apparition, depuis le saint-simonisme, l'a dit; sur ce point toutes les écoles socialistes ont été d'accord.
La grande différence entre les révolutionnaires politiques et les socialistes consiste en ce que les hommes politiques voulaient faire des réformes et des améliorations en restant sur le même terrain que le monde catholique. Le socialisme, au contraire, a proclamé la négation la plus complète de l'ordre des choses existant, il a nié la monarchie et la représentation souveraine, les tribunaux et les droits, le code civil et le code criminel, il a nié l'Europe féodale, catholique, comme le faisaient, par rapport à Rome, Saint Paul ou Saint Augustin, ces hommes qui disaient en face aux Romains: «Pour nous, vos vertus sont des vices, votre sagesse est folie; comme il en est pour vous de notre sainte foi».
Une pareille négation, si elle s'enracine et se répand, si elle agite toute une génération, n'est pas un caprice d'une imagination maladive, elle n'est pas le cri individuel d'une âme froissée par le monde, mais bien un arrêt de mort prononcé contre un monde décrépit et qui ne tardera pas à être exécuté.
L'Europe actuelle tombera sous la protestation du socialisme, non seulement parce que son iniquité est devenue manifeste, mais encore parce qu'elle a épuisé toutes ses forces vitales, absorbé son propre sang, sa pulpe nerveuse; parce qu'enfin elle n'est plus capable de continuer son développement: elle n'a rien à faire, rien à dire, rien à produire; elle se jette dans le passé pour fuir l'avenir; elle réduit son activité au conservatisme; elle n'agit pas: elle garde sa place!
Vous voulez arrêter l'accomplissement des événements que vous prévoyez! Mais que conservez-vous donc avec tant de zèle, avec tant d'obstination?.. Vous pouvez réussir pour un temps quelconque, je ne dis pas le contraire.
Telle est la part du lion de la volonté humaine dans les affaires d'histoire; l'histoire n'a nullement ce caractère de prédestination forcée qu'on enseigne dans les écoles catholiques et qu'on prêche dans les églises philosophiques. Elle a un élément très variable dans sa formule; c'est l'élément de la volonté subjective. L'homme improvise, il crée. Mais naturellement, cet élément a ses bornes et ses conditions; et ce n'est pas une révolution universelle qui pourrait être arrêtée pour longtemps par des regrets et par des violences.
On peut encore concevoir qu'en donnant le change aux esprits, en les éblouissant, en les trompant, par un but fantastique, on rend impossible la résistance. Napoléon l'a prouvé. Mais est-ce par des moyens pareils que procède la réaction?
Les deux moyens de M. Cortès sont le retour à l'autorité monarchique et à la foi catholique, c'est-à-dire à la superstition et à la terreur.
Mais en premier lieu, nous demanderons à M. Cortès comment nous ferons pour avoir une foi que nous n'avons plus, pour ne pas douter là, où nous doutons, ne pas savoir ce que nous connaissons? Cette question n'est pas nouvelle, Byron lʹа déjà posée à une dame piétiste qui voulait le convertir au schisme de l'église anglicane.
Donc, il ne reste que la terreur.
On pardonne beaucoup en faveur du progrès, et pourtant la terreur, lorsqu'elle se fit, même au nom du progrès et de la liberté, souleva avec raison tous les cœurs généreux.
Et la réaction demande la terreur comme moyen de répression, pour maintenir un statu quo, dont la décrépitude et l'impuissance ont été constatées avec tant d'énergie par notre orateur. Elle veut la terreur pour reculer, elle veut consacrer l'enfance pour nourrir le père cacochyme.
Avez-vous sérieusement pensé au sang qu'il vous faudra répandre pour retourner aux temps heureux de l'édit de Nantes et de l'inquisition? Remarquez-le bien, je ne dis pas que cela soit impossible, je connais trop le genre humain pour en douter; mais cela ne sera possible que lorsqu'on se permettra des Saint-Barthélémy et des massacres de Septembre. Il vous faudra, pour cela, assassiner tout ce qu'il y a d'énergique dans notre génération, déporter, décimer tout ce qui pense, écrit, agit; il vous faudra enfoncer le Peuple encore plus dans l'ignorance et le spolier complètement pour augmenter ses armées permanentes, il vous faudra passer par un infanticide moral de toute la génération suivante… et tout cela pour sauver une forme sociale épuisée, qui ne suffit plus ni à vous, ni à nous, pour se préserver de la barbarie et de l'invasion russe, au nom de la civilisation.
Mais où est, de grâce, la différence entre l'invasion russe, la barbarie et votre civilisation catholique?
Sacrifier des hommes, des générations, le développement d'une époque entière à l'état actuel. Y pensez-vous, philanthropes chrétiens? Mais est-ce qu'en général ce Moloch d'Etat est le but de l'homme; autant vaudrait dire que le gant est le but de la main ou le toit le but de la maison. Quant à moi, je ne connais aucune forme d'existence sociale, aucune question politique, patriotique ou théologique, pour laquelle je voulusse donner la bénédiction à l'assassinat, pour laquelle je voulusse proposer de sacrifier un seul être humain. L'homme a bien le droit de se dévouer, de se sacrifier lui-même. Mais, en vérité, l'héroïsme de l'abnégation pour les autres est trop facile pour être une vertu. Il arrive, par malheur, qu'au milieu des orages populaires, les passions longtemps comprimées se déchaînent, sanguinaires et implacables, sans ménagements et miséricorde; nous pouvons les comprendre, les accepter, en nous couvrant la tête, mais les élever à la hauteur d'une théorie, les recommander comme moyen, jamais!
Et n'est-ce pas cela que fait M. Cortès en se faisant le panégyriste du soldat discipliné de l'armée permanente?
Vous dites que le prêtre et le soldat sont beaucoup plus près (l'un de l'autre) qu'on ne le pense; aveu sinistre! – Ce sont les deux extrémités qui se rapprochent, comme ces deux ennemis restés seuls sur la terre dans «Les Ténèbres» de Byron, lorsque tout ce qui était entre eux a péri. C'est sur les ruines du vieux monde que les derniers représentants de l'esclavage moral et de l'esclavage physique se donnent la main pour le sauver.
L'église chrétienne s'est servie des soldats dès le jour où elle devint religion d'Etat. C'est vrai, mais jamais elle n'osa avouer cette apostasie; elle sentait bien ce que cette alliance avait de mensonger, d'hypocrite; c'était une des mille concessions qu'elle faisait au temporel, tant méprisé par elle. N'en voulons pas à l'Eglise pour cela, c'était une nécessité dictée par la force des choses, et qui tenait à l'essence même de la doctrine chrétienne, éminemment transcendantale, utopique. L'étique abstraite de l'Evangile ne fut jamais qu'un noble rêve, sans aucune chance de se réaliser.
Eh bien! ce que l'Eglise n'a jamais osé, a été fait par M. Cortès. Il a eu l'audace de mettre le soldat à côté du prêtre, l'autel à côté du corps de garde, l'Eglise à côté de la caserne, l'Evangile qui pardonne à côté du code militaire qui fusille les frères.
Messieurs, chantons un De profundis ou un Te Deum si vous le voulez; c'en est fait de l'Eglise et de l'armée!
Enfin, les masques sont tombés, on s'est reconnu. Oui, le prêtre et le soldat sont des frères; ils sont les malheureux enfants de la confusion morale, du dualisme dans lequel l'humanité se débat. Et celui qui dit: «Aime ton prochain et obéis à l'autorité», dit la même chose que l'autre qui répète: «Obéis à l'autorité et fais feù sur ton prochain».
L'abnégation chrétienne est aussi contraire à la nature que l'assassinat par obéissance. Il fallait dépraver, pervertir toutes les notions les plus simples dans la conscience de l'homme pour lui faire accepter une démence pareille comme vérité, comme devoir. Une fois ceci accepté, qu'il faut détester la terre et honorer le ciel, qu'il faut mépriser le temporel, le seul bien que l'on a, et chercher l'éternel, qui n'existe que dans notre faculté d'abstraction, on parvient aisément à accepter aussi que n'est rien, que l'Etat est tout, que le «salus populi supremo, lex est», que «pereat mundus et fiat justitia», et toutes les autres maximes qui sentent la chaire brûlée, qui rappellent la torture, le triomphe, l'ordre.
Mais pourquoi donc M. Cortès a-t-il oublié le troisième membre conservateur, l'ange-gardien des sociétés qui s'écroulent, – le bourreau?
Est-ce parce que le bourreau se confond de plus en plus avec le soldat, grâce à la noblesse d'âme des chefs et à la rigueur de l'obéissance passive?
Dans le bourreau brillent au suprême degré toutes les vertus qu'honore M. Cortès: la vénération de l'autorité, l'obéissance passive, l'abnégation de soi-même. Il n'a pas besoin de la foi d'un prêtre, ni de l'enthousiasme du danger qui anime le soldat. Il tue avec sang-froid, impassible comme la loi, comme le couteau; il tue pour venger la société; il tue au nom de l'ordre; il entre en concurrence avec tous les scélérats, et sort victorieux, appuyé sur la société. Moins fier que le prêtre et le soldat, il n'attend aucune récompense ni des dieux, ni des hommes; il ne cherche pas la gloire, il abdique son honneur, sa dignité d'homme, le tout pour le triomphe de l'ordre.
Justice donc à l'homme de la justice vengeresse. Nous disons aussi à la manière de Cortès: «Le bourreau est beaucoup plus près du prêtre qu'on ne pense».
Oh! le bourreau joue un grand rôle chaque fois qu'on crucifie un monde nouveau – ou qu'on guillotine un vieux spectre!
Et à propos du Calvaire et des bourreaux, passons aux persécutions des chrétiens, passons aux fragments de M. Capefigue, si vous n'avez pas une bonne histoire des premiers siècles sous main. Ou, ce qui est bien mieux, ouvrons Tertullien et les premiers Pères, d'un côté, et les écrits des défenseurs de l'ordre, des conservateurs romains, de l'autre. Même lutte, même acharnement, même énergie, exprimés dans les mêmes termes. Les chrétiens sont traités par Celse ou Julien comme des rêveurs, des utopistes, comme des visionnaires; ils sont flétris parle nom d'ennemis de l'Etat, de la famille, de la propriété, comme assassins d'enfants. – On croit lire un premier-Paris enragé du Constitutionnel, ou de l'Assemblée Nationale.
Si les amis de l'ordre romain ne provoquaient pas à des massacres, c'est que le paganisme était plus humain, plus tolérant que les conservateurs hauts bourgeois et orthodoxes, c'est que Rome antique ne connaissait pas encore l'expédient catholique des Saint-Barthélémy, glorifié jusqu'à nos jours par les fresques du Vatican. L'esprit est le même; s'il y a une différence, elle n'existe que dans les calculs et les individualités; c'est la différence entre le rapporteur Bauchard et le rapporteur Pline, entre la clémence de César Trajan, son horreur des dénonciations, et la clémence de César Cavaignac, qui ne partageait pas cette susceptibilité, et notez bien que cette différence est un véritable progrès: le pouvoir a tellement baissé, qu'un Pline ou un Trajan devient aujourd'hui impossible, à la tête d'un Etat ou d'une comission d'enquête.
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